Europe : le tournant grec du 13 juillet 2015

5 août 2015 - Posté par Alain Grandjean - ( 21 ) Commentaires

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« L’accord » signé par l’Eurogroupe après des mois de négociation avec la Grèce a agi comme un révélateur. Quelques soient les responsabilités des uns et des autres dans la situation sociale, économique et administrative de la Grèce à ce moment-là, un tel coup de force, totalement contradictoire avec la tradition de négociation européenne ne peut que laisser des traces profondes dans son histoire.

 

On peut en effet faire quelques constatations :

  • cet accord est d’une brutalité insoutenable pour un peuple déjà meurtri par des années de plans d’austérité et très affaibli au plan économique
  • il est irréaliste : les mesures demandées vont aggraver la récession en cours et bien sûr la capacité de l’Etat Grec à rembourser sa dette
  • il demande au gouvernement grec actuel de faire en quelques semaines des réformes, discutables, que les pays européens mettent des années à faire dans le meilleur des cas
  • il le met de fait sous tutelle
  • il a été obtenu grâce à la réduction de l’accès aux liquidités des banques (due à la BCE) et au contrôle des capitaux qui a mis l’économie au bord de l’asphyxie (nombre de PME sont au bord du dépôt de bilan ne pouvant s’approvisionner pour des achats courants et indispensables pour leur survie) et obligé Alexis Tsipras à signer
  • Alexis Tsipras s’était enlevé toute marge de manœuvre en faisant savoir qu’il n’envisageait en aucun cas la sortie de l’Euro (parce qu’il n’avait pas de majorité pour le faire au sein de Syriza) et plus précisément en refusant l’ alternative monétaire (le « plan B » ) que préparait Yanis Varoufakis.

 

 

Les interprétations sur les intentions allemandes (patrons manifestes de l’Europe) font florès. Les plus évidentes sont les suivantes :

  • une volonté de punir voire d’humilier le gouvernement grec et de faire comprendre aux opinions espagnoles, italiennes et françaises que l’espoir suscité par l’élection d’Alexis Tsipras (indépendamment d’ailleurs de sa couleur politique) était entièrement infondé : there is no alternative , TINA !
  • un souhait de faire sortir la Grèce de l’Euro (souhait exprimé publiquement par le ministre des finances allemand Wolfgang Schaüble, mais sans doute éprouvé par de nombreux citoyens allemands et européens) alors que les traités ne donnent pas de cadre juridique à cette sortie ; le meilleur moyen est donc de rendre la vie impossible aux grecs, ce qui va se passer dans les prochains mois.

 

 

La fin du rêve européen ?

Quoi qu’il en soit, cet accord et la négociation qui l’a précédé me semblent montrer clairement l’impossibilité de modifier par la seule discussion rationnelle avec nos voisins allemands le cœur de la gouvernance actuelle de la zone Euro. Est-ce une vraie surprise ?

 

Deux précédents au moins auraient pu servir de révélateurs :

 

 

Mais Silvio Berlusconi était trop décrédibilisé pour que son élimination émeuve les foules ; quant à Chypre, son économie hyper financiarisée de type paradis fiscal, favorable aux russes fortunés ne poussait pas à la compassion, sans compter que sa petite taille (un peu plus d’un million d’ habitants) pouvait faire passer son « traitement » par la Troïka comme exceptionnel.

Le cas de la Grèce est encore considéré par certains de nos concitoyens comme « hors-norme », du fait de la désastreuse réputation de son administration et de la difficulté des citoyens à payer l’impôt. Il s’agit là d’une dangereuse illusion. Yanis Varoufakis a raison de dire que « Paris est la destination finale de la Troïka » . Et Romaric Godin, l’excellent analyste de la saga grecque (Rédacteur en chef adjoint Economie à La Tribune) a raison d’affirmer qu’il n’y a en fait aucun désaccord entre Berlin et Paris.

Il est essentiel d’entendre ce que nous dit cette terrible « négociation ». Les totems « ordo-libéraux » sont sacrés, intangibles (voir la série de posts sur le dogme) : équilibre budgétaire à assurer, dette publique à limiter, monnaie sous contrôle exclusif de la BCE, imposant une politique déflationniste de fait (son mandat visant en priorité la lutte contre l’inflation) et surtout ayant le pouvoir d’imposer le programme de la Troïka à un gouvernement élu démocratiquement ou de l’abattre.

Ces totems sont d’autant plus adorés qu’ils protègent l’épargne des plus riches et s’accompagnent de mesures présentés comme incontournables : flexibilisation du marché du travail, aggravation de la mise en concurrence de tous contre tous, ouverture accrue de l’Europe à la compétition internationale (avec le TAFTA)…qui là aussi ne profitent qu’aux plus aisés (les « nomades » comme le montre Pierre-Noël Giraud).

Cet idéal étroitement comptable (Stéphane Foucart rappelle à juste titre que la dette allemande surpasse la dette grecque si on prend en considération les impacts écologiques) auquel se ramène finalement l’actuel projet européen, camoufle de plus en plus mal un projet politique à l’opposé des valeurs européennes. Il est évidemment sans aucun souffle et sans aucune capacité d’attraction pour les jeunes générations, qui sont confrontés à taux de chômage colossal, à des menaces de toutes sortes et se sentent privés d’avenir alors que leur présent est sombre.

L ‘Europe s’enfonce dans le délire. Si ce n’est clairement analysé c’est évidemment ressenti par ceux de nos compatriotes qui vont se réfugier dans le vote Front National ou l’abstention. Mais la majorité d’entre nous sommes comme anesthésiés. Probablement du fait de la conjonction d’une montée angoissante des périls (du changement climatique à la menace islamiste en passant par le conflit avec la Russie), d’un contrôle de plus en plus étroit des medias et d’un consumérisme tentant pour une société de plus en plus déstructurée et individualiste. Tentant mais anesthésiant : la consommation qu’elle soit matérielle ou « immatérielle » (la navigation sur Internet ou la plongée dans les programmes de télé) fait oublier la réalité.

 

Sortir de l’Euro ou changer le mode de gestion de l’Euro ?

Alexis Tsipras s’est heurté au refus d’une large majorité du peuple grec de sortir de l’Euro, qui semble assez partagé par l’opinion publique française. C’est ce que nous rappelle Jean Gadrey dans une série de posts  consacrés à tuer l’ idée que la solution consiste à sortir de l’Euro.

 

Si en effet il semble aujourd’hui impossible de sortir démocratiquement de l’Euro, il est plus que jamais nécessaire de construire une alternative à la gestion actuelle de l’Euro. Mais sous condition de ne pas oublier que :

  • les bases de la construction actuelle de l’Euro, les « totems » rappelés ci-dessus, ne sont pas négociables avec les dirigeants allemands,
  •  le nerf de la guerre c’est la monnaie, comme l’a montré la BCE dans les cas chypriote et grec.

 

Il m’apparaît maintenant complètement illusoire de croire qu’il sera possible de faire évoluer l’euro en dehors d’une période de crise majeure subie ou organisée. Il est donc impératif de préparer un nécessaire rapport de forces pour imposer ce nouveau mode de gestion de l’Euro dans une crise organisée. Et ce rapport de forces ne pourra pas s’installer tant que l’alimentation en monnaie appartiendra irrévocablement à la BCE.

Tout plan B passe donc nécessairement par une alternative monétaire. Un dispositif dit « Euro monnaie commune » (voir http://www.chomage-et-monnaie.org/2010/02/17/fiche-n-13-une-monnaie-commune-comment-ca-marche/ et http://www.chomage-et-monnaie.org/2011/07/18/et-si-leuro-sombrait/) ou de monnaie complémentaire  est donc stratégique. Il reste encore quelques mois pour étudier les solutions possibles, leurs avantages et inconvénients; ne pas le faire c’est se condamner et condamner l’Europe à continuer sa dérive dangereuse.

 

La France a la capacité de le faire ; et elle peut le faire car elle est évidemment incontournable en Europe.

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21 Responses to “Europe : le tournant grec du 13 juillet 2015”

  1. Brillante analyse cher Alain, dont on ne peut hélas que partager les prolégomènes, mais je ne suis pas sûr de te suivre à la fin: Impossible de construire un rapport de force « tant que l’alimentation en monnaie appartiendra irrévocablement à la BCE », et le paragraphe qui en découle. Imagines-tu vraiment la BCE (et les banques centrales nationales, qui impriment les euros…) passer au cou de l’Espagne, l’Italie, la France, le même nœud coulant qu’au cou de Tsipras? Moi j’ai un peu de mal…

    •   Alain Grandjean   5 août 2015 à 18 h 07 min

      Cher Cédric, oui je l’imagine…ou plutôt j’imagine bien que nos courageux gouvernements et leur administration du Trésor, dont j’ai eu l’occasion de constater l’incroyable arrogance dans le conformisme le plus étroit, ne feront jamais rien pour prendre ce risque et nous ferons plutôt subir 50 ans d’austérité stupide…Je ne crois plus du tout en la possibilité de mettre en place gentiment une alternative à la « gestion actuelle » de l’Euro. Donc faut trouver un moyen pour en sortir, mais sans dire qu’on sort de l’euro car là tout s’effondre….Mais ce n’est peut-être qu’un contre-coup de la mission canfin-grandjean et de ce que j’ai compris en live du blocage sur la question monétaire, ce que tu as quand même bien repéré en lisant notre rapport…
      cdt
      alain

    • Cher Cedric,
      Un petit indice : les Français ont voté non au référendum de 2005. Le traité constitutionnel a pourtant bel et bien été mis en place. Autrement dit, nous pouvons compter sur une partie de notre classe politique pour passer le nœud coulant au cou de l’economie France dans le mépris le plus total de la « volonté populaire » tout en expliquant que, bien sûr, ça ira mieux demain, d’ailleurs, le Pib frémit déjà à la hausse, etc. En Italie, renzi a tout de même réussi ce dont Monti n’avait sans doute même pas rêvé mais que Trichet , dans la plus pure indépendance politique de la BCE, avait exigé de Berlusconi : supprimer le CDI.
      On peut d’ailleurs te retourner la question : vois-tu un seul de nos présidentialisables de 2017 résister à l’aimable pression conjuguée de la troïka et de Berlin ? Amicalement, gG

  2. Salut Alain

    Bien d’accord avec le constat… plus dubitatif sur la proposition.
    En raison du « Spread »…, qui j’imagine, nous exploserait à la figure, dès qu’une épreuve de force avec les tenants de l’ordo-libéralisme (ce ne sont pas tous les Allemands… ni seulement des Allemands), serait engagée.

    Dans la mesure ou cette crainte finit de bloquer toutes les issues… je me demande s’il ne faut pas se contenter, au moins dans l’immédiat, d’une mesure « Lisbonne compatible » (ne débouchant pas forcément sur une crise F-A…).

    Il s’agit d’une mesure que tu connais bien: la création d’un Pole public financier de taille suffisante, (par exemple celle de la BNP…), pour nous donner accès au Taux REFI de la BCE, au moins pour les emprunts négociés par l’AFT.
    Un taux moyen de 1% sur la dette publique, (au lieu de 3% en ce moment), permettrait d’économiser ~30 milliards /an à la fois sur le budget de l’etat et sur le déséquilibre de la balance des paiements .

    Plus de détails, dans ce pdf : http://tinyurl.com/dividette

    •   Alain Grandjean   6 août 2015 à 9 h 09 min

      Bonjour Raymond
      il y a à mes yeux trois natures de propositions :
      1-celles qui sont acceptables de la part de la direction du Trésor : en lisant en détail le rapport Canfin-Grandjean on comprend ce dont il est question; elles sont évidemment utiles à la cause mais ne font avancer que millimétriquement les choses
      2-les propositions telles que celle que tu évoques, (utiliser de manière massive la création monétaire via un établissement public ou propositions assimilées) et que j’ai poussé aussi avec certains (dont Cédric)
      3-les propositions plus radicales qui visent à modifier en profondeur le système monétaire

      J’ai travaillé avec une équipe, un budget important, des soutiens de grandes entreprises sur une idée de Gaël qui est de type 2 (projet SFTE); le mécanisme proposé a été repris (ou a été construit en parallèle…) dans le cadre du plan Juncker. Mais en France rien n’a avancé vraiment.Et le plan Juncker est devenu complètement opaque, aux mains d’une équipe de technocrates; je ne vois pas bien ce qui va en sortir.
      Suite à mon expérience sur la mission financements climat et surtout à l’épisode grec qui est d’une violence hallucinante, je ne crois plus du tout au fait qu’on puisse dans le cadre doctrinal actuel (en effet partagé entre les principaux dirigeants socio-démocrates ou « libéraux » et par l’administration du Trésor, dans sa majorité) faire avancer les propositions de type 2. Elles sont en effet perçues très vite comme :
      – des contournements de l’esprit du traité de Lisbonne (car elles redonnent de l’air aux économies)
      – donnant beaucoup trop de pouvoir au secteur public qu’il faut réduire
      – risquant de faire la preuve que la rigueur budgétaire n’est pas fatale et que les « réformes structurelles » ne sont pas indispensables

      Elles ne sont jamais poussées politiquement pour une raison assez simple : le personnel politique est démuni complètement dans son rapport de forces avec Bercy and co (et par ailleurs ne voit pas d’intérêt à court terme de se créer des problèmes de cette nature, c’est plus simple d’entonner la chanson de la pensée unique). Du coup les demi-mesures n’étant pas réalistes autant aller au fond des choses et traiter la question au fond.
      Tu as raison d’évoquer la réaction des marchés. C’est en gros la deuxième boite (ou la première?) de Pandore, avec la réaction de la BCE.
      C’est pour cela qu’il faut bien réfléchir au plan B…et ne pas improviser.
      Bien cordialement.
      Alain

  3. Merci Alain

    Pour les infos, et pour ces explications claires et convaincantes !
    Je ne peux m’empêcher de rapprocher cette analyse du… « Choix de Syriza », (tel que Frédéric Lordon l’avait formulé en janvier):
    « Passer sous la table ou la renverser » !

    Parmi les 3 types de propositions que tu distingues, il me semble que seule la première se situe dans la ligne: « Ne pas renverser la table » (ou plutôt: « Ne pas prendre le risque du Spread »…)
    De la sorte, ce qui distingue les 2 dernières, c’est seulement leur degré de radicalité: les 2 supposent un soutien populaire suffisant pour permettre de bousculer la pensée unique, et les dogmes ordo-lib. venus d’outre Rhin.

    Des lors que l’on réfléchit à un plan B, il me semble qu’une question décisive est :
    quelles sont les propositions qui recueilleront le plus vite un soutien populaire suffisant ?
    En considérant ce critère, je me demande, si le choix de zapper les propositions du 2ième type, de se tourner d’emblée vers les plus radicales, tient compte de la persistance de l’attachement à l’Euro ? (Le cas grec vient de nous montrer à quel point, il peut constituer un… « Facteur clé d’échec » !)

    On peut aussi considérer qu’un retournement de l’opinion sur la question d’une réforme profonde de l’Euro, (ou de son démantèlement), est un préalable à toute tentative pour sortir de la nasse… Quoi qu’il en soit, tu es mieux placé que moi pour « choisir entre les inconvénients », cette activité qui est… une définition de l’action politique !
    Merci encore pour cet échange !

    •   Alain Grandjean   15 août 2015 à 22 h 00 min

      Bonsoir Raymond
      je n’ai pas répondu à ce commentaire (celui du 6 août 22H37); l’argument de l’opinion publique et de son attachement à l’euro est celui que met Jean Gadrey en avant. Jl refuse (très démocratiquement) de considérer que le bon peuple est anesthésié. C’est au fond ce que je pense. La campagne médiatique sur la négo grecque était très frappante. Ce n’est qu’en lisant romaric godin et mediapart qu’il était possible d’entendre autre chose que la présentation officielle. Mais il me semble que si un plan B est construit et assez crédible il pourra être mis en oeuvre car l’opinion est très versatile. Quant aux propositions du deuxième type je ne les zappe pas. mais je crois qu’elles subiront les mêmes blocages meme si apparemment elles sont plus faciles à « vendre ». amitiés
      alain

  4. CHER ALAIN,

    je partage ton analyse et tes inquiétudes sur les dérives de l’Europe et la domination allemande;
    Ce qu’ on impose a la Grèce est inacceptable et insoutenable!
    Nous ne devons pas accepter une Europe qui repose sur « la règle  » et non « le choix » des peuples pour paraphraser Fitoussi!
    Merci de ton analyse , je suis effectivement atterrée !
    Il faut réagir et ne pas laisser faire.
    Cordialement
    Carole.

  5.   André-Jacques Holbecq   8 août 2015 à 7 h 47 min

    Bonjour Alain et tous

    Très beau blog , je lui souhaite un grand succès.

    S’il ne devait y avoir qu’un seul critère utilisé pour la définition des parités entre monnaies nationales dans un cadre de monnaie commune , ce devrait être celui de la balance extérieure, car se baser sur les PAA, n’est plus possible compte tenu de la « falsification » de ce pouvoir d’achat du fait des redistributions intraeuropéennes: ce serait un mauvais repère. Voir précisément ce qu’était devenu le revenu grec, portugais ou autre il y a 10 ans.

    En attendant, mes doutes ne font que croître sur la possibilité de mettre d’accord 19 pays sur les parités croisées de leurs monnaies nationales … les « euros francs » et euros xxxxx » me semblent très utopiques si ce n’est très critiquables par leurs adversaires (qui ne manqueront pas de poser cette question de l’accord à 19.)

    Je pense donc que les retours aux monnaies nationales stabilisées doivent précéder d’éventuels accords de monnaie commune à 2 ou 3, 4 …19.

    Amitiés
    AJ

    • Salut André Jacques, bonjour Alain, bonjour à tou(te)s !

      L’excédent commercial de l’Allemagne dépasse 8%, c. à d. qu’il ne respecte pas l’une des exigences de l’UE en matière de politique économique…
      Il me semble que l’opinion publique n’est pas assez informée de la dure réalité des échanges commerciaux: les excédents ne proviennent pas de la planète Mars… ceux des uns, (par exemple au Nord), ne peuvent exister qu’à raison des déficits des autres… (par exemple au Sud).

      De la sorte, un excédent allemand supérieur à 6% ne sera sans doute pas jugé aussi sévèrement qu’un déficit budgétaire de supérieur a 3%. Des considérations élémentaires de macro-économie permettent, il me semble, de rétablir la perspective:
      – le déficit public peut être un instrument de lutte contre le chômage (car pour que les entreprises et les ménages aient un surplus -cela s’appelle la croissance du PIB -, il FAUT que l’Etat ait un déficit, ou alors… qu’il ait un excédent commercial, c a d. un déficit chez les autres.)
      – Dans ce jeu à somme nulle, l’excédent commercial allemand… c’est donc du chômage en plus chez les autres, Non ?

      En résumé, outre son caractère non coopératif (un comportement de « passager clandestin »), la politique économique allemande ne respecte pas les Traités… Je me demande si la Commission qui en est la gardienne va proposer d’envoyer la Troïka, pas seulement a Athènes mais aussi… à Berlin ?!

      Poser la question, c’est y répondre… Une application flexible de règles molles, (adaptables selon la raison du plus fort…), est un élément de plus pour justifier une nécessaire réforme des institutions. Comme celle-ci est impossible (plusieurs dizaines de droits de veto), Si on ne peut réformer l’UE de Lisbonne, la question se pose de la démanteler pour en construire une autre. Voir
      http://blog.mondediplo.net/2015-07-18-La-gauche-et-l-euro-liquider-reconstruire

    •   Alain Grandjean   11 août 2015 à 9 h 47 min

      bonjour André-Jacques
      oui il faut travailler cette question…mon intuition c’est qu’il faut démarrer avec du un pour un et définir quelques règles qui sont ensuite appliquées, j’imagine cependant que sapir ou lordon ont déja réfléchi au sujet? il fait en tous les cas partie de la liste de courses…
      amitiés
      alain

  6. Bonjour
    Vous écrivez dans un commentaire « ce que j’ai compris en live du blocage sur la question monétaire, »
    Vous pouvez préciser ?
    Merci d’avance

    •   Alain Grandjean   15 août 2015 à 21 h 18 min

      Bonsoir RST
      la direction générale du Trésor (qui doit être convaincue d’une proposition pour qu’elle soit reprise par l’Elysée, dans le domaine monétaire et financier) est convaincue que :
      1 la monnaie est neutre et ne doit pas être utilisée pour favoriser un secteur, pas même le « vert » (qui n’est pas un secteur); il n’est pas souhaitable à ses yeux que la banque centrale favorise les actifs « verts »
      2 la monnaie doit être émise en contrepartie d’actifs courts; la BCE ne doit pas avoir à son actif des créances ou des titres longs (en dehors de l’or et des devises); j’avais en tête l’idée que la BCE rachète des créances longues ou très longues de la BEI. No way. Or le long est utile pour le vert…
      3 inutile de le rappeler la BCE ne peut pas racheter leurs dettes aux etats directement ou leur faire des prêts; c’est Maastricht. du coup les banques font de belles marges sur leurs prêts aux Etats. ce serait pourtant assez simple d’envisager des prêts directs aux états et administrations publiques pour les invts verts uniquement. No way.
      Sur ces points le blocage est total. Sur le premier point il est possible d’écrire car Il y a effectivement un débat mondial. et la BCE a pris position par la voie de Benoit Coeure. La banque centrale de chine et celle du bengladesh avancent dans cette direction mais évidemment deux exemples non convaincants (un pays communiste et un pays sous-développé). C’est tout cela qui fait l’étonnement de Cédric Philibert dans son blog http://cedricphilibert.net/politique-monetaire-et-transition-energetique/
      bien à vous
      ag

  7. Merci pour votre réponse.
    Je n’ai pas lu votre rapport dans le détail mais, le parcourant (rapidement), j’avais été surpris de ne pas trouver un chapitre sur le financement par la création monétaire.
    Je comprends mieux maintenant pourquoi

  8. merci Alain de ce papier et merci pour ces analyses
    en plein mois d’aout il est probable que seuls des passionnés lisent
    vu de grèce il n’est pas sur que les Grecs eux mêmes aient vraiment compris ce que sera l’accord du 13 juillet
    peut être faudrait il lire l’encyclique de François aux directeurs du Trésor, de Bercy et de l’Eurogroupe, avec explication de texte pour qu’on ait un bout d’espoir ? car le tableau dressé est bien sombre somme toute.
    Benoit

    •   Alain Grandjean   16 août 2015 à 11 h 46 min

      bonjour Benoit
      oui Aout est idéal pour prendre du recul…quant à l’encyclique dont je vais parler dans un prochain post, en effet il faut en faire la promotion active, la cible c’est le prochain gouverneur de la banque de france, un catholique convaincu…
      cdt
      alain

  9. Il me semble que, dans les débats (si peu nombreux, au fond) qui, au sein de l’espace public français, tournent autour de la réforme de l’euro, il y a un obstacle à franchir : l’idée que renoncer à cette Europe-là signifie forcément en revenir à une forme ou une autre de souverainisme national-quelque chose, un peu nauséabond et très égoïste.
    La prise de parole de Daniel Cohn-Bendit, qui affirme que le souverainisme n’est pas de gauche, me paraît alimentée par ce type d’alternative sommaire :

    http://bruxelles.blogs.liberation.fr/2015/08/13/daniel-cohn-bendit-le-souverainisme-est-de-droite-parce-quil-repose-sur-legoisme-national-et-legoisme-nest-pas-une-valeur-de-gauche/

    Il doit y avoir moyen de faire entendre qu’il y a une différence entre souverainisme et souveraineté démocratique.

    Le souverainisme, c’est l’idée qu’il n’y a de souveraineté que nationale (avec toutes les ambiguïtés que recèle le concept de nation depuis Barrès, Maurras, etc.). La souveraineté démocratique; c’est l’idée que ceux qui exercent la tâche du souverain (de gouverner) doivent représenter d’une manière ou d’une autre la volonté collective. Pas de démocratie, donc, sans souveraineté démocratique.
    L’UE et la zone euro actuelles bafouent toute forme de souveraineté démocratique, on l’a vu de manière caricaturale à propos de la Grèce. Et les articles de presse que publie à présent Yanis Varoufakis révèlent à ceux qui en doutaines ent la visée politique très claire qui a sous-tendu pendant 6 mois la (non-)négociation des autorités europénnes, tout comme l’incurie de nos medias qui nous ont servi un récit desdites (non-)négociations digne des campagnes de dénigrement de l’époque Brejnev.

    L’erreur serait d’enfermer le débat entre : cette Europe-là, antidémocratique, et le souverainisme.

    La sortie par le haut, c’est une souveraineté démocratique qui passe, peut-être, par un retour à la case Etat-nation mais pour mieux reconstruire des relations inter-étatiques.

    Quatre remarques complémentaires :

    1) au 19 ème siècle, c’est la gauche qui est patriote, et c’est la droite qui est « cosmopolite » (parce qu’elle espère que les monarchies voisines, germanophones en particulier, vont aider la France à surmonter les dangers de la Révolution). Il y a donc aussi un refus de la patrie qui est profondément réactionnaire. Ce n’est en gros qu’au tournant du vingtième siècle, et notamment avec l’Affaire Dreyfus, que le nationalisme, de droite, supplante le patriotisme de gauche.

    2) l’idée actuelle que l’Etat n’aurait plus aucune substance est un conte de fées : la sphère financière est tout entière construite sur l’idée que les dettes souveraines (voilà le mot qui revient…) sont le collatéral « sûr » par excellence, sur lequel tout repose. Si les dettes souveraines ne valent plus rien, c’est une énorme partie de l’édifice financier qui s’effondre (au sens où tous les actifs gagés sur un collatéral souverain ne valent plus rien). Pourquoi ? Parce que, pour l’instant, la souverain reste celui qui est capable de lever des impôts (pour payer les dettes, par exemple, sauver les banques, etc.).
    En réalité, le cosmopolitisme néo-libéral, y compris « à gauche », est parfois juste un discours universaliste de façade (« généreux ») qui masque la tonte systématique de la laine des contribuables. Normal qu’il soit anti-démocratique ; tout l’enjeu, c’est que le mouton ne se rebelle pas.

    3) Un débat collatéral à ces questions politiques tourne autour du protectionnisme. La thèse selon laquelle le protectionnisme, ce serait eo facto la guerre, l’égoïsme, le repli « nationaliste », etc. n’a aucun contenu historique ou analytique défendable.

    4) Ceux qui ont pensé et organisé l’architecture mondiale d’une planète régie d’abord par la mobilité du capital, ce ne sont pas les « loups » de Wall Street (qui se seraient volontiers contenté de relations bilatérales à la manière du TAFTA, lesquelles permettent de dépecer un pays en silence), ni l’administration de Washington. Ce sont des Français et, majoritairement, socialistes et, souvent, chrétiens : Jacques Delors, Pascal Lamy, Michel Camdessus, DSK… C’est cette génération qui, déçue par le prétendu échec de 1981-1983, de convainc que la finance de marché mondialisée, c’est l’avenir de l’humanité, et qui « pense » l’architecture de la globalisation néo-libérale via quatre institutions majeures (où l’on retrouve beaucoup de Français à la manoeuvre) : le FMI, l’OCDE, l’UE et l’OMC.
    A la fin des années 1990, Delors proposera même que le FMI puisse infliger des sanctions à n’importe quel pays qui prendrait des mesures défavorables à la mobilité du capital. Et ce sera Washington qui, avec le pragmatisme qu’on lui connaît, mettra son veto à cette idée…

    Pour oser penser une mondialisation néo-libérale multilatérale, il fallait des Français pétris de l’universalisme de la Révolution et de Victor Hugo, des socialistes fascinés par une finance internationale sans lutte des classes, et des chrétiens qui ont reproduit inconsciemment le vieux projet pontifical (très pugnace tout au long du Moyen-Age, et jusqu’au Concile de Trente) d’un règne « spirituel » au-dessus des souverains légitimes, par le droit (canon pour les uns, le droit de international pour les autres).
    gG

  10. Chers amis,

    Ce que je n’arrive pas à voir dans ce que vous exprimez, c’est comment on pourrait faire une sortie de l’euro qui débouche sur un renouveau démocratique. D’abord, si la condition d’une position de l’Elysée c’est l’accord de la Direction du Trésor, comme le dit Alain, alors la sortie de l’euro est tout aussi impossible que sa réforme… Ensuite: quelle grande force politique défend la sortie de l’euro? Eh oui, il n’y en a qu’une… L’attachement à l’Euro est d’ailleurs l’une des rares barrières qui retient encore de nombreux électeurs de droite de voter FN. N’alimentons pas ce moulin, même avec les meilleures intentions, et même si – ou justement parce que – la gestion européenne de la crique grecque en fait elle-même assez dans ce sens!

    Une question que je me pose, c’est la place du… nucléaire, dans l’incapacité de la France à trouver un terrain d’entente avec l’Allemagne sur les moyens d’une relance en Europe. Je ne suis pas encore sûr, en effet, que le financement de la transition énergétique ne serait pas un sujet, peut-être le seul, sur lequel on pourrait les faire (ré-)fléchir. Encore faudrait-il qu’on y croit vraiment ici, et tout indique – y compris le « contenu » de la loi, et l’absence de programmation des investissements – que ce n’est (toujours) pas le cas. Mais ce n’est sûrement qu’une explication (très) partielle…

    Amicalement à tous

    •   Alain Grandjean   19 août 2015 à 10 h 28 min

      Bonjour Cédric
      Sur le second point, je partage toujours l’idée qu’un plan de relance européen devrait être centré sur l’énergie (production et économie d’), indépendamment des désaccords avec l’Allemagne sur le nucléaire (les difficultés de la filière en France rendent sans doute les français moins arrogants sur ce sujet). Mais je ne peux que constater que la volonté politique n’y est pas en France et bien pour des questions de doxa économico-financière : c’est Bercy qui bloque.
      Concernant le premier point je suis d’accord sur deux points : 1 dans une campagne politique il est mal venu de défendre une sortie de l’euro et
      2 l’évolution vers l’euro monnaie commune ne se fait pas sans avoir un DGT en place qui est ok avec ce plan,
      Si nous proposons de réfléchir à un plan B c’est parce que nous pensons que rien sinon ne va nous faire sortir du marasme croissant qu’on subit. les incroyables bouffées d’oxygène que constituent la baisse du prix du baril et la surabondance de liquidités à taux nul ou presque ne nous servent à rien (si ce n’est à végéter, ce dont se satisfait Michel Sapin. Et bienheureux celui qui croit qu’elles vont durer l’éternité.
      bien amicalement
      alain

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