Nicolas Sarkozy a déclaré le 13 avril ((Les Echos du 14 avril)) devant des parlementaires UMP que les propos de Christophe de Margerie, jugeant inévitable que le litre de super grimpe à 2 euros étaient indécents. L’ancien président d’EDF Pierre Gadonneix avait été démis de ses fonctions pour avoir dit une autre vérité qui fâche, celle de la hausse inéluctablement forte du prix de l’électricité.
Le président de la République sait que le prix des énergies ne peut que continuer à croître ((Les rapports s’empilent sur ce sujet, dont le dernier signé par le FMI ne fait que confirmer ce que tous les experts savent : les tensions sur l’énergie sont croissantes – ajoutons le rapport de HSBC qui annonce un prix durable du pétrole à 150 dollars le baril)), mais il semble penser qu’il est préférable de le cacher aux Français ou de faire croire comme le dit Philippe Chalmin qu’il a le pouvoir (comme celui du roi de France qui pouvait guérir par simple imposition des mains ?) de les faire baisser.
Sans revenir en détail ici sur les raisons structurelles de ces hausses et notamment celle du prix du baril, rappelons que le franchissement de la barre des 100 dollars est antérieur aux événements du Moyen-Orient. Ils sont dus à la conjonction de la croissance économique mondiale et au plafonnement de la production. Qui peut par ailleurs garantir le maintien du pouvoir en place en Arabie Saoudite (le deuxième producteur mondial de pétrole) ? Quelles seraient les conséquences sur le baril d’une telle déstabilisation ? Comment croire un instant qu’il est possible d’empêcher une forte hausse ?
Dans ce contexte, le président de la République fait une triple erreur :
- c’est un déni démocratique : comment les citoyens peuvent-ils s’investir dans la vie publique si elle est fondée sur des contrevérités exprimées par le président de la république qui en plus leur donne le sentiment de les prendre pour des imbéciles ?
- c’est une grave erreur sociale et économique : si on refuse d’admettre l’inévitable, on ne donne pas aux citoyens les moyens de s’y préparer, et c’est bien sûr les personnes en précarité énergétique qui en souffriront le plus
- c’est une erreur politique : les citoyens finissent par faire payer au moment des élections le bricolage politicien et le manque de vision.
Il est grand temps que nous nous préparions à une crise énergétique qui sera d’autant plus grave qu’elle n’aura pas été anticipée, alors qu’elle était annoncée.
Il est grand temps que s’organisent en France des Etats Généraux de l’énergie pour permettre à chacun d’y voir clair, tant sur les politiques possibles, sur leurs conséquences, sur les coûts, que sur l’organisation européenne et française de l’énergie. Pour permettre à chacun de prendre les mesures indispensables pour réduire sa propre vulnérabilité et pour faire jouer une solidarité qui sera plus que jamais nécessaire.
5 réponses à “Hausse des prix de l’énergie : indécence du PDG de Total ou dangereuse cécité du président de la République ?”
Aussi nécessaires soient-elles, les conclusions de tels Etats Généraux ne manqueraient pas de déplaire. N. Sarkozy doit estimer qu’il ne peut pas se permettre de prendre un tel risque avant les élections.
In the long run, we’ll all see the peak oil !
Keynes, version post-carbone
d’accord avec 90 % du post (sauf pour EDF : l’augmentation du prix serait en partie une façon de faire financer par les français les investissements pas très futés d’EDF a l’étranger c’est ce qu’on appelle « Le syndrome Véolia »)
Donc tout à fait d’accord a un ajout près : le litre a 2 euros est ineluctable …tout comme les 20 mds de profits de Total sont ineluctables. Et a un moment on a envie que Total participe un peu plus à la transition énergétique (pas qu’eux d’ailleurs). Ton propos est le plus important mais il ne faut oublier quelques éléments d’équité économique entre les perdants de la rente nrj et les gagnants de la rente nrj (chalmin a oublié ça depuis au moins 20 ans…)
A la limite, peu importe à qui profite l’augmentation du prix de l’électricité tant que ça peut nous amener à consommer moins.
Pas tout-à -fait ; selon où va l’argent l’usage qui en est fait n’est pas le même. En particulier les pétroliers sont incités à forer toujours plus…