Où vont-ils chercher ces milliards qu’ils n’ont pas?

Fin 2008, les banques françaises ont été sauvées de la gigantesque crise de liquidités à laquelle elles étaient confrontées grâce à un montage aussi astucieux qu’éclairant sur les mystères de la création monétaire. L’économiste Bernard Vallegeas en a fait un décodage percutant dans un article paru dans la revue Regulations du premier semestre 2009.

Résumé : « Le premier volet du plan de sauvetage du système financier français d’octobre 2008 prévoit qu’une société ad hoc, filiale de l’État et des banques, empruntera avec la garantie de l’État sur les « marchés ». Les capitaux ainsi amassés seront reprêtés aux banques pour qu’elles puissent financer l’économie. Ce plan est curieux car il fait fi de la création monétaire comme si c’étaient les « marchés » qui créaient la monnaie. En réalité il est montré que les banques peuvent utiliser la société ad hoc pour se créer de la monnaie à leur profit puis la reprêter à l’économie et utiliser les titres obligataires garantis par l’État comme outil de refinancement auprès de la Banque centrale européenne. L’État se comporte ainsi comme un assureur permettant l’accès aux crédits de la Banque centrale européenne. »

Et le sommaire interactif : 

 

2 réponses à “Où vont-ils chercher ces milliards qu’ils n’ont pas?”

  1. Avatar de Jean Bayard

    Je ne partage pas l’analyse faite par Bernard Vallageas au cours du premier semestre 2009 (lien cité dans ce post).

    Pour bien comprendre les enjeux monétaires de l’époque, il faut rappeler que « le plan de sauvetage du système financier français » mis en place par la loi du 16 octobre 2008, survient tout de suite après la mise en faillite de Lehman Brothers du 15 septembre 2008.

    Outre les noms des principales banques françaises, cette loi mentionne aussi celui de Dexia. Ce qui laisse supposer que les problèmes sont les mêmes pour toutes. Bien que cela n’ait pas été dit, tout porte à croire que les autorités monétaires et gouvernementales ont cherché à masquer les effets dévastateurs des subprimes dans les portefeuilles des banques.

    Le 24/07/2009, Vincent Benard nous dit que la SFEF est une structure mixte créée en catastrophe à la fin de l’année 2008 pour, selon le gouvernement, apporter des liquidités aux banques pour qu’elles financent l’économie.

    Puis le 07/10/2009, selon Reuters.com, la Société de financement de l’économie française (SFEF), un des deux piliers du dispositif de sauvetage des banques, annonce qu’elle met fin à ses activités de financement des établissements de crédit, via des émissions obligataires garanties par l’Etat.

    Le Financement de l’économie française n’aura pas duré longtemps !

    Il est tout à fait probable que la SFEF ait servi de structure de défaisance ou de bad bank.Pour entrer au capital de cette nouvelle société, il est fort probable que les banques aient apporté les titres toxiques (subprimes) qu’elles possédaient alors. Il fallait absolument que leurs comptes soient nettoyés avant le 31 décembre.

    On ne saura jamais quel sort aura été réservé aux titres apportés au capital et à ceux qui ont pu l’être après la constitution de la SFEF.

    Une nouvelle citation pour terminer :

    (Sfef, SPPE : les Sages attendent des corrections du 7 juillet 2009) :

    « La Cour des comptes a présenté le 30 juin 2009 un rapport d’étape sur les concours publics aux établissements de crédit. Tout en reconnaissant la pertinence et l’efficacité des deux dispositifs mis en place par les pouvoirs publics, Philippe Séguin relève plusieurs dysfonctionnements, essentiellement dus à la précipitation et à un certain manque de coordination dans les conventions passées entre les pouvoirs publics et les banques. »

  2. Avatar de Jean Bayard

    Quelques précisions manquant dans mon commentaire d’hier.

    En préambule

    Avant l’affaire des subprimes. A la sortie de la compensation sur Target2, les banques règlent entre elles leurs positions sur le marché interbancaire. Les banques en position créditrice prêtent à leurs consœurs débitrices contre garantie naturellement. En pratique, Target2 permet de procéder aux paiements / livraisons des titres donnés en garantie.

    Notons qu’à l’issue de la compensation sur le SIT (équivalent de Target2 pour les faibles montants), remplacé par Core en octobre 2008, les règlements sont bilatéraux (de banque à banque) et s’opèrent de gré à gré. La banque créditrice consent un prêt (généralement en blanc = sans garantie) à la banque débitrice.

    Donc, jusqu’à l’automne 2008 les banques apportent en garantie les titres « subprimes » et les titres souverains qu’elles détiennent principalement dans ce but. Ces titres disposent des meilleurs notes des agences de notation avant l’éclatement de la crise.

    Devenant toxiques, ils ne sont plus acceptés en garantie sur le marché interbancaire. C’est le premier choc systémique bancaire.

    En conclusion

    Si mes hypothèses sont bonnes, le montage juridique a servi à faire passer les titres toxiques des banques vers la structure ad-hoc, d’abord sous forme d’apport au capital puis contre des titres SFEF, comportant la garantie de l’Etat français.

    Il n’y a pas création monétaire, seulement des échanges de titres. Il ne s’agit pas d’une crise de liquidités, mais d’une crise de méfiance à l’égard des garanties apportées.

    Les banques peuvent alors remettre des collatéraux sains sur le marché interbancaire qui fonctionne à nouveau normalement.

    Dexia, vraisemblablement trop intoxiquée, n’a pu bénéficier de ce montage. On connait la suite qui lui a été réservée.

    Les opérations faites par la SFEF sur les marchés européens et étrangers pendant quelques mois seulement peuvent être assimilées à des leurres envoyés à destination du public pour dissimuler la vraie nature de l’opération de sauvetage des banques.

    En définitive, les contribuables français paient la note des dégâts causés par les banques américaines dans l’affaire des subprimes. Personne ne s’étonne qu’aucune poursuite ne soit engagée contre elles.

    Le système monétaire reste vraiment impénétrable.