M. Henri Sterdyniak (ci-après HS) vient de publier une analyse critique de notre ouvrage « Une monnaie écologique » publié en mars dernier aux éditions Odile Jacob. Il met au passage plusieurs personnes en accusation de ne pas « comprendre » les questions monétaires et de développer des théories « fausses », dont Gaël Giraud, avec lequel notre forte et amicale convergence de vues nous conduit à cosigner cette réponse. Contrairement à notre contradicteur, dont la méthode est pour le moins discourtoise et vise à discréditer les personnes qui sont en désaccord avec lui, nous allons ici nous consacrer à l’essentiel, à savoir la discussion du fond et pouvons remercier HS pour cette opportunité de débattre. D’autant qu’il reconnaît que nous avons raison sur plusieurs points, notamment sur la question du financement de la transition, de la nécessité d’investir et de couper la dépendance des banques centrales aux marchés financiers. Ce qui n’empêche pas de sérieux désaccords. Notons en introduction que nous partageons ces désaccords avec une partie des économistes atterrés, ceux qui ont écrit et signé le livre « La monnaie, un enjeu politique », et avec de nombreux autres économistes, alors qu’en revanche HS semble partager la doxa dominante sur de nombreux points. Nous le retrouvons donc dans le camp de celles et ceux qui, refusant l’usage de l’arme monétaire, sont acteurs ou complices des politiques d’austérité qui enfoncent l’Europe et la France dans une crise sociale et économique sans fin.
Nous avons pris le parti, pour faciliter la lecture et le débat, de regrouper les principaux points de désaccord de manière thématique. Cinq sujets principaux nous semblent pouvoir être recensés sur lesquels nous pouvons présenter les positions qui nous opposent, afin que le lecteur puisse se faire une première opinion avant d’aller vérifier par lui-même ce que nous écrivons dans le livre :
- le premier point concerne la réalité de la création monétaire et son fonctionnement sur lequel HS laisse planer un doute, voire une défiance certaine, au mépris de certaines réalités de base ;
- le second point est le principal sujet de discorde : il s’agit de la possibilité ou non qu’il puisse exister une création monétaire libre (sous-entendu libre de dettes). C’est un point essentiel sur lequel les critiques de HS nous semblent infondées et à courte vue. Keynes l’avait envisagé bien avant nous et des exemples historiques existent ;
- le troisième point concerne le financement des dépenses publiques et l’évolution de la masse monétaire. Il nous apparaît que HS tient sur ce sujet de curieux raisonnements, qui font abstraction complète du rôle du crédit et qui sont marqués par une vue statique de l’économie, ce qui peut le conduire à une pensée du rationnement contre-productive ;
- le quatrième point est tout à fait mineur dans notre ouvrage et dans notre pensée puisqu’il s’agit de la question de la MMT (Modern Monetary Theory) avec laquelle nous partageons certes nombre de constats et d’intuitions mais aussi quelques désaccords comme sur l’existence ou l’intérêt d’une fiction d’un compte consolidé Etat-Banque centrale, que HS reprend pourtant à son compte. En aucun cas, nous ne nous en revendiquons mais HS fait dire à la MMT ce qu’elle ne dit pas, tout en oubliant ses propositions les plus intéressantes. Il est donc utile de clarifier quelques points ;
- enfin, le dernier point est relatif à l’annulation des dettes publiques détenues par la BCE: ce point n’est qu’une des propositions de notre ouvrage, et pas la principale. La question a par ailleurs déjà fait l’objet de nombreux débats publics grâce notamment à des tribunes dans la presse que nous avons coécrites. Mais il n’est pas inutile d’y revenir ici au sens où cela participe du même mouvement d’analyse que celui de la création monétaire libre.
Nous espérons qu’après ce bref tour d’horizon, le lecteur aura envie d’aller voir par lui-même et de lire cet ouvrage, ainsi que d’autres qui partagent des positions très souvent similaires comme Illusion financière de Gaël Giraud (Ed. de l’Atelier, 2013), car ils nous semblent contenir, au-delà des débats intellectuels, des propositions tout à fait concrètes qui méritent selon nous d’être discutées dans l’espace public et qui intéressent, au-delà des économistes, l’ensemble du corps social.
Alain Grandjean, Nicolas Dufrêne, Gaël Giraud
2 réponses à “Réponse aux critiques de Henri Sterdyniak sur le Livre « Une Monnaie Ecologique »”
277000 millards de dollars cela est le montant de la dette mondiale å fin 2020. A ceci il faut ajouter les sommes engagėes dans les partenariats public/privė qui sont des charges de long terme plus les dettes dissimulées sous le tapis grace aux astuces des ėcritures comptables. Notons enfin le montant, sans doute, considėrable de « mauvaise dette » qui permets aux ėtats de faire rouler leurs emprunts (sauf quand les taux sont négatifs) ou å acheter la paix sociale et/ou d’autres choses également improductives. La véritė (pour faire simple) est qu’une monnaie ėcologique ou non brūle les doigts et les cervelles des agents politico-ėconomiques, c’est à dire nous tous, et sans vouloir lancer un autre dėbat il me semble que Monsieur Vincent Mignerot lorsqu’il énonce » Trop tard pour agir depuis toujours » a mieux compris que quiconque ou se trouve le facteur determinant qui conduit si mal la destinėes de toutes les espèces vivants sur cette planète . Que nous nous aveuglions de notre puissance soit mais au moins ne nous racontons pas des contes de fėes pour ne pas à avoir à en faire le constat.
Par ailleurs ramemer le dėficit budgétaire à 2% au lieu de 3 ne permet pas de se désendetter, tout au plus cela limite le montant de l’emprunt pour couvrir ce déficit, pour cela selon moi seul un exėdent budgétaire conséquent ou gagner au loto le permet.
Vous trouverez ma réponse à ce texte à l’adresse
https://blogs.mediapart.fr/henri-sterdyniak/blog/021220/pour-en-finir-avec-la-pensee-monetaire-magique-38