Un règlement européen pour lutter contre les dérives de la mondialisation

La mondialisation entrave la transition écologique et met en péril l’avenir des éleveurs et agriculteurs européens : c’est le constat effectué par le Think Tank de la Fondation Nicolas Hulot, l’interprofession bovine INTERBEV et l’Institut Veblen, dans un rapport publié le 26 mars. Les trois organisations défendent un règlement européen sur les importations, basé sur un principe de mesures-miroirs. Elles appellent les dirigeants français et européens à porter dès maintenant cette réforme pour une adoption en 2022, à l’occasion de la présidence française de l’Union européenne.

Entre 2005 et 2019 l’importation de denrées agricoles et alimentaires en Europe a augmenté de 28%. Or, si les conditions d’élevage et les modes de production agricole, notamment le recours aux pesticides, répondent à une réglementation européenne stricte, c’est loin d’être le cas pour les denrées importées, des produits souvent issus d’élevages moins regardants sur la traçabilité et les normes ou bien cultivés avec des pesticides interdits dans l’Union européenne.

Le rapport « Mondialisation : comment protéger l’environnement et les agriculteurs ? » analyse les conséquences de l’inaction de l’Europe en la matière et démontre que cette politique commerciale va à l’encontre des engagements environnementaux et de santé publique de l’UE, impose une concurrence déloyale aux éleveurs et agriculteurs européens et freine voire remet en cause la transition écologique et sociale.

Un règlement qui alimenterait un cercle vertueux

Tandis que certaines voix s’élèvent pour dénoncer cette hausse des importations agricoles comme la conséquence d’un manque de compétitivité de l’agriculture européenne, mettant en avant la nécessité d’abaisser les normes, la FNH, INTERBEV et l’Institut Veblen estiment qu’un tel nivellement par le bas est inadmissible.

En outre, à l’heure où les produits agricoles n’échappent plus à la mondialisation, et malgré les engagements ambitieux que s’est donné l’Europe, il devient illusoire d’espérer répondre aux exigences environnementales, sanitaires et éthiques élevées de l’UE par des normes s’appliquant uniquement aux produits domestiques.

Face à ce constat, les trois organisations défendent l’instauration de mesures-miroirs, ou mesures de réciprocité, c’est-à-dire l’application des règles environnementales et des normes protectrices en vigueur au sein de l’UE aux produits importés sur le territoire européen.

La présidence française de l’Union européenne au premier semestre 2022 est une opportunité politique majeure d’adopter un tel règlement. En plus de protéger les acteurs agricoles européens et de maintenir un niveau d’exigence sociale et environnementale élevé, il alimenterait un cercle vertueux, obligeant nos partenaires commerciaux à faire évoluer leurs pratiques pour pouvoir accéder au marché européen.

Loin d’être opposés aux échanges, les trois organisations défendent une régulation de la mondialisation qui mette le commerce international au service de la transition agroécologique et d’une juste rémunération des agriculteurs en Europe.

Alain Grandjean